myrzouick

écrire, scénariser et mourir vite...

13/07/2020

un an plus tard

Il y a un an, à une vache près, je commençais à écrire dans ce blog les trucs qui me venaient en tête sur l'écriture en générale mais surtout sur les séries et les films en particuliers.
Il y a un an, je rappelais à quel point il est difficile d'écrire et d'autant plus difficile d'écrire une suite.
Je prenais pour exemple Game of Thrones (saison 8), WestWorld (saison 2) et Harry Potter, qui sera mon running gag tout au long de ce blog devenant une véritable obsession d'après les dires de certaines personnes.

Un an plus tard, alors que WestWorld propose une saison 3 à laquelle je n'arrive pas à accrocher et que plus personne nulle part et jamais ne parle plus de Game of Thrones (la faute à cette ultime saison, je pense), je me vois réécrire, comme coincé dans une boucle temporelle, qu'écrire une suite est une chose bien délicate et qu'il est très facile de se casser la gueule.

Avant de me lancer dans une critique de Last of Us 2 (que je n'ai pas encore fini - et donc je veux vraiment le finir pour vous dire ce que j'en pense vraiment - mais sachez tout de même que ça part mal et ça me désolé de ne pas aimer jouer à ce jeu) je voulais faire un état des lieux de ces "suites" que personnes n'aiment et qui n'existent pas...
Ecrire une suite, c'est difficile.
D'accord, on a fini par le savoir, mais pourquoi est-ce si compliqué ?
Pourquoi l'auteur original que nous avons salué nous déçoit forcément ? Est-ce l'attente trop longue, l'espoir trop fort ? Est-ce une entreprise vouée à l'échec par définition ?

On débriefe...

la suite de trop ?

Est-ce que toutes les suites sont des suites de trop ?
Dans un monde où il faut exploiter un filon jusqu'au dernier gramme d'or, les suites sont un business facile.
Il est simple de faire des suites. Les personnages sont déjà connus et en place, on peut capitaliser sur leur image, on connait leur popularité.
Et les producteurs les plus intelligents proposent désormais des contrats pour 2, 3, 4 films à leurs acteurs et actrices pour être sûrs de ne pas avoir à changer de visage entre deux saisons ou entre deux films.

Faire une suite, c'est aussi pouvoir se passer de présentaion de la diégèse (on en avait parlé de ça aussi).
L'univers dans lequel les personnages évoluent est le même. Dans Indiana Jones, on admet que des artefacts existent et que c'est un type avec un fouet qui les as trouvés.

Mais c'est aussi la limite de l'exercice.
La diégèse est ce qui ne peut pas être changée. Sinon la suite n'existe pas. Ce n'est pas une suite si on change l'univers dans lequel elle se passe alors ce n'est plus une suite direct au premier opus.

Dans WestWorld (saison 2) je reprochais aux auteurs d'avoir rajouté des flashbacks à un personnag pour l'étoffer et le faire partir dans une autre direction.
C'est aussi ce qui se passe dans Game of Thrones, même s'il n'y a aucun flashback, on ne prend pas en compte certains développement de personnages et on les... crame.

Diégèse, personnage, deux fils d'équilibristes sur lequels les auteurs des suites doivent marcher pour faire avancer une histoire.
Mais même quand ils y arrivent plutôt bien, on n'aime pas les suites...

Toutes les suites sont des suites de trop parce que les spectateurs sont schizophrènes : on n'aime pas mais on en veut.
Pire que ça, si les suites ne sont pas surprenantes (que l'auteur reste sur un chemin balisé, connu, reconnu) on dit qu'elles ne sont pas surprenantes, qu'elles n'apportent rien, que si c'est juste pour avoir de nouvelles images il n'y a aucun intérêt.
Et si les suites changent un peu trop un concept, une diégèse, un personnage, on n'aime pas, on dit qu'il aurait fallu respecter le chemin...

Vous l'aurez compris, une suite c'est casse-gueule. Et pourtant ça marche du tonnerre... Alors pourquoi ?

le crane de cristal...

En fait, Indiana Jones 4 n'est pas si naze...
Je veux dire il a été mieux reçu que le deuxième trop sombre, pas assez épique.

Que reproche-t-on à Indiana Jones 4 ?
La scène du frigo ?
Les gars, il saute en parachute dans la montagne avec un canot gonflable dans le 2...
La course poursuite de la jungle ?
... Ouais non, là, j'avoue...
Le fait qu'on voit l'extraterrestre ? Et alors ? Je ne sais pas. Y a des trucs qui marchent. D'autres qui ne marchent pas.
Mais Indiana Jones 4 ne trahit pas les autres Indiana Jones : il y a une quête, Indiana Jones est toujours imprévisibile, il est intelligent, il se bat bien.

Alors on lui a reproché de prendre tout avec une hauteur déconcertante. En gros, il n'est jamais inquiet, jamais intéressé vraiment. Et c'est un truc terrible dans une oeuvre écrite ou cinématographique.
Si un personnage - et encore plus le héros - n'est pas impliqué ou trouve sa quête idiote, alors le spectateur ne fera pas l'effort de s'intéresser à la quête.
Si le personnage passe sont temps à trouver ça con, le spectateur trouvera ça con... Donc le fait qu'on pense que pour Indy il n'y a aucun enjeu (parce qu'il est assez cool) bah on ne croit pas non plus à sa quête.

Mais en vrai ce qu'il fait c'est fou !

Et mine de rien, il n'est pas si nul le crâne de cristal. C'est Indiana Jones !
Plus vieux, certes, mais ça reste le même personnage dans le même univers.
Par les mêmes auteurs...

C'est comme pour le film Les Bronzés 3.
Oui je vais dans quelques secondes comparer Indiana Jones 4 et les Bronzés 3.
Le film s'est fait défoncé car c'est une incroyable bouse mais... qu'est-ce qu'on reproche au film ? Les personnages sont tous d'incroyables égoïstes, leurs défauts sont exacerbés avec l'age. Mais ce sont les mêmes connards qu'à la montagne ou à la mer...
Toujours écrit par le Splendide, réalisé par Leconte.
On a du Clavier qui fait du Clavier, Jugnot qui joue un connard homophobe, Lhermite qui est un looser flamboyant (bien qu'un peu moins pimpant que lors du premier film) et JC (Dus) qui, ne change pas.
C'est une bonne suite.

Alors attention, le film est pas terrible du tout. Mais il est dans la lignée des autres !
Alors pourquoi est-ce que personne ne l'aime ?
Pourquoi fait-il partie de ces suites de trop ?

l'attente...

Revenir dans la diégèse que le premier opus a construit c'est casse-gueule. C'est casse gueule, comme je l'ai dit plus haut pour plusieurs raisons.
La première, la définition même du concept de diégèse c'est "tout ce qui existe même ce qui n'est pas filmé". Ce qui fait que parfois les diégèses, dans l'inconscient collectif, dans l'esprit du public sont bien plus vastes que tout ce qui existe dans le film ou dans le livre.
Les gens se font leur propre théorie sur tout ce qui se passe et la suite, en répondant à des questions que le premier opus ne se posait pas, détruit partiellement ou totalement la diégèse imaginée, inventée par les spectateurs.

Le pire c'est que souvent, les pire suite sont l'oeuvre des mêmes auteurs que les films originaux.
Comme si ces mêmes personnes capables d'inventer tout un monde, tout un univers ne le comprenaient plus aussi bien que d'autres.
Il faut dire, ça peut se comprendre, d'un millier de cerveaux échafaudant des théories, écrivant des fans fictions sortent forcément plus d'idées, d'envie différente.

Revenir dans la diégèse pause un second problème.
Le premier auteur ne se rend peut-être pas compte de ce qu'il a suscité.
Indiana Jones n'est peut-être qu'un film pour Spielberg, mais c'est une icone. Et on ne peut pas toucher une icone et la remplacer par un sac de sable sans se faire poursuivre par une grosse pierre qui roule.
Alors peut-être que l'auteur d'une histoire, d'une diégèse, ne se rend pas compte de ce qu'il a fait, de ce qu'il a entre les mains. George Lucas lui-même s'est réfugié à Hawaii en prophétisant que son film d'auteur/space opera allait faire un four...
Et aujourd'hui on crucifie ceux qui essaient de le bouger.

Quand George Lucas est arrivé avec sa suite et ses nouvelles idées, il s'est fait torpillé par les fans qu'il avait créés.
Il n'a pas compris l'importance de ce qu'il avait fait.
C'est d'ailleurs bon signe si on y réfléchit bien, plus une suite est détestée plus ça veut dire que le materiel de base a suscité de l'engouement, plus les spectateurs se sont engagés.

On en vient au troisième problème pour écrire une suite : surprendre, tricher ou continuer ?
Surprendre le spectateur au risque que le perturber ?
Tricher en racontant autre chose ?
Continuer en ne mettant en scène que la même histoire.

Pour faire une bonne suite, il faut faire un peu des trois et ce mélange est casse-gueule. Je pense que je vous en reparlerai quand nous irons voir Kaamelott au cinéma.

Ce qui m'amène à une ultime décision que peut prendre un auteur...

Confier...

Aliens c'est bien.
C'est bien parce que l'univers d'Alien a été confié à un autre réalisateur que Ridley Scott.
Et si c'était pas ça la solution. A l'instar des Missions Impossibles ou chaque réalisateur apporte sa patte à l'ensemble du projet, ou des James Bond, ou encore des Marvel qui ont eu de la chance de tomber sur les frère Russo, les suites écrites par d'autres sont généralement de bonnes factures.
On ne va pas relancer le débat ici, mais le Hobbit aurait peut-être été bien mieux avec Guillermo Del Toro et Star Wars postlogie est mieux que Star Wars Prélogie.
Aliens c'est bien, Alien Covenant, c'est non.

Et si l'astuce c'était de ne pas faire de suite. De laisser les gens s'approprier une histoire.
En plus, nos réalisateurs fétiches des années 80-90 ont engendré des cinéastes avertis, des spectateurs rêveurs. Nous sommes bien plus spécialistes dans ce que nous voyons que l'était nos grands-parents.
Nous connaissons les techniques, les ressors, les besoins, les ambitions artistiques, donc forcément, comme je l'ai déjà dit un peu plus tôt, nous sommes plus exigeants.
Alors pourquoi ne pas confier notre histoire à des bardes plus expérimentés ?

Les Spielberg, Scott, Tolkien ont tout inventé. Ils sont partis de rien.
Nous avons la chance d'avoir vécu et de vivre dans un monde où nous avons été inspirés.
Nous avons la chance de connaitre des techniques, de voir des making-of, de baigner depuis tout petit là-dedans.

Alors pourquoi ne pas nous confier les rênes ?

Bon l'inconvénient (ou presque) c'est que tout (ou presque) a déjà été fait ou écrit et qu'on ne peut pas se contenter de pisser de la copie.

épilogue, épillet

Je viens de finir Last of Us 2 et je pense qu'il faudra effectivement que je vous en parle la semaine prochaine.
Car cette suite est symptomatique de l'écriture de suite en général.
Ou comment miser sur les personnages existant tout en bifurquant pour surprendre le joueur.

Cela fait un an donc que j'écris dans ce blog.
En même temps, j'ai passé un an à écrire un livre qui, j'espère, sera bien accueilli par le plus grand nombre et qui me fera enfin passé à la postérité.
Meh...
Et durant un an, j'ai théorisé sur l'écriture sans connaitre vraiment, j'ai donné des leçons sans vraiment les suivre, j'ai changé d'avis, j'ai cherché un sens à ce blog, à mes livres, à des films.

Je m'attèle donc depuis un an à chercher l'histoire et l'histoire de l'histoire.
Cela fait un an que je cherche à comprendre pourquoi on écrit, pourquoi j'écris plus personnellement, et pourquoi il faut écrire.
Je ne suis pas spécialement au niveau de grands youtubeurs que je cite de temps en temps mais j'essaie de tirer mon épingle du jeu car oui, à la fin, je pense que je fais tout ça surtout pour moi.

Alors je ne cherche pas à me faire mousser, loin de là, et si jamais, les statistiques de visites sur ce site me font redescendre sur terre, mais au fur et à mesure que j'écris j'ai découvert des trucs.
Au fur et à mesure des articles, de cette constance que je me suis imposé, j'ai découvert à quel point il était facile de trouver des histoires.

Mieux encore, il est facile d'écrire, de raconter.
Tout le monde raconte des trucs tout le temps.
On raconte des histoires arrivés plus tôt dans la journée, on raconte des aventures, des cascades...
On diffuse des rumeurs, on donne des contre-vérités, on rassemble, on divise.

De tout temps, les histoires nous ont servi à nous connaitre nous mêmes.
Les rumeurs sont aussi importantes dans la façon dont on les rapporte que sur leur sujet véritable.
Les histoires qu'on échange autour d'un feu en faisant griller des chamallows racontent quelque chose de nous.

Nous sommes des morceaux d'histoires. Des morceaux de souvenirs plus ou moins beaux.

La suite ? Nous la vivons jour après jour.
C'est peut-être pour ça qu'il est si difficile d'écrire une suite.
Parce que nous mêmes nous ne savons pas réellement l'imaginer.

J'en ai écrit des choses sur ce blog.
Et il y aura une suite...
Je vais continuer d'écrire ici. Peut-être moins fréquemment, peut-être moins intimement car vous savez quoi, à la fin, vous vous en êtes rendu compte que je ne parlais que de moi !

A la semaine prochaine ! J'aurais digéré Last Of Us 2 et on en parlera !
Portez-vous bien !
Prenez soin de votre histoire.

à suivre...

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