myrzouick

écrire, scénariser et mourir vite...

15/09/2021

jambon-beurre

Sérieusement ?
Le mec se prend pour un écrivain, il essaie de creuser pour trouver sa vraie personnalité de barde dans ses écrits et ses pensées et tout ce qu'il trouve de mieux pour faire sa rentrée c'est un jambon-beurre ?

Delerme avait sa première gorgée de bière, nouvelle que je n'ai jamais lu parce que je n'aime pas la bière et que la première que j'ai bu c'était dans un bar à strip-tease il y a plus de 10 ans... longue histoire que je ne détaillerai pas ici.
Disons simplement que j'étais pas dans mon état normal, qu'il fallait consommé, que j'avais rien demandé et que pour finir la strip-teaseuse, ma foi forte sympathique s'est bien foutu de ma gueule.

Bref, comme tout le monde, j'ai un passé trouble mais je ne regrette rien.
Et comme beaucoup d'entre vous/nous, je n'avais, jusqu'à il y a peu, mangé de véritable jambon beurre.

Aujourd'hui donc, on va parler de jambon-beurre !

contextualise moi ça

Vous vous souvenez de ce documentaire que j'avais partagé de McBaguette ? Si celui qui explique que McDonald s'est mieux implanté en France que partout ailleurs dans le monde. Dans le doute, je vous le remets ici : McDo, une passion française c'est mieux qu'un documentaire Netflix.
Oui moi je regardais Arte avant Netflix...

A un moment donné, dans le documentaire, on interview des concurrents français du géant américain, un certain Christian Godin, ancien boucher de Corrèze à qui les journalistes font gouter des triangles...
Cet Auvergnat fait des sandwichs - "non, ici on parle français on dit casse-croute ! c'est écrit dessus" - fait des casse-croutes avec du vrai pain, du vrai jambon et du vrai beurre.

Par un hasard du calendrier en plein mois d'aout, entre deux visites de magasin, je me suis perdu dans un Paris presque désert, je me suis perdu dans le deuxième arrondissement.
Et j'ai décidé de me garer à deux pas du Petit Vendôme.
J'étais donc dans ce bistrot bondé, à deux pas de la place du même nom. "C'est central, c'est prêt de tout" dirait mon père.
Et je me suis aperçu qu'à part le plexiglas anti-covid, ce bistrot/charcuterie n'a pas changé.
La motte de beurre, le jambon, le pain croustillant...

J'ai toujours voulu mangé un vrai jambon-beurre.
Pas que je n'en aie jamais mangé avant, mon père nous ramenait du marché du vrai jambon à l'os, je n'ai jamais manqué de beurre salé dans le frigo et de pain frais.
Mais je n'avais jamais manger un jambon-beurre à Paris (de Paris).
Et donc, j'en ai commandé un...
5€. ça va.
On me le fait minute, du beurre bien étalé (pas à l'auvergnate), du jambon, dans un pain d'un boulangerie d'à coté).
Et je suis reparti manger mon Jambon-beurre au pied de la tour Eiffel ! Quitte à faire.

et ?

Y a tellement de suspens quand je parle de bouffe.

Le pain craque sous mes dents, le soleil transperce les feuillages - Komorebi - Même si je ne connais à ce moment pas encore ce mot. Il y a du beurre jusqu'au crouton, le jambon est savoureux.
A chaque bouchée je redécouvre une sorte de simplicité ingénue.
Ceux qui ont fait ce casse-croute savent qu'ils font quelque chose de bien. Il le font à la minute.
Je sors de mon corps, je me vois comme si je parcourais les nuages. Je suis assis sur le capot de ma citroën bleue (pour que le cliché soit parfait, j'imagine une 2CV). La Tour Eiffel pointe le ciel bleu devant moi. Une légère brise souffle.
J'ai chaud, mais je n'enlève pas ma veste. Vous m'auriez vu, là, posé nonchalemment, vous m'auriez peut-être trouvé séduisant. Là au milieu de la foule de touriste ou de couples se bécotant sur l'herbe du champ de mars je suis seul avec mon jambon-beurre.

La prochaine fois, je prendrais un jambon du patron, persillé à l'herbe.
Ou simplement un Jambon-Emmental.
Mais putain, à cet instant j'ai l'impression d'être là où il faut, quand il faut et je fais ce qu'il faut. Je fais ce que je veux. J'existe. Je souffle...

Une gorgée d'eau, de l'Evian que je trouve meilleure avec le temps. Je froisse le papier et me dirige doucement vers la poubelle.
Je bosse. Il faut retourner travailler après cette pause impromptue.
...
Mais... Quelque chose cloche.
Une colère sourde m'envahit alors.
Une irrépressible envie de hurler. Une envie de casser. Une rage indéfectible.

C'est quoi votre putain de problème !?
Putain, mais pourquoi tout le monde ne fait pas ça ?! Je veux dire c'est tellement simple !
Pourquoi ce n'est pas possible à Paris, à moins de connaitre deux trois adresses comme celle-ci de manger un véritable jambon-beurre ? Avec juste du jambon, du beurre et du pain ?
Le Petit Vendôme fait d'autres casse-croutes hein, mais toujours à base d'ingrédients frais.
Alors qu'est-ce qu'ils attendent les boulangeries, les Monoprix pour proposer un peu de cette simplicité ?

je viens de manger au pied de la Tour Eiffel un plat d'une simplicité, d'une sobriété, d'une classe rare. Aussi élégant que je l'étais ce jour là.
Pourquoi chaque touriste n'est pas reçu par ce putain de jambon-beurre ?
Paris, c'est une poubelle pour les pauvres japonnaises qui sont obligé de faire une thérapie. Mais y a rien de plus simple en fait. Jambon-beurre, Tour Eiffel (alors pas coté trocadéro, hein, y a des palissades de bois pour je ne sais quelle raison encore) mais tout devient simple.

Pourquoi c'est difficile d'avoir quelque chose de si simple ?

Quand mon frère fait un gratin dauphinois maison, il n'y met pas 50 ingrédients, de la crème et des patates.
Pourquoi c'est si difficile ?
Pourquoi on se tape encore des steak surgelé et des coulants industriels dans les bistrots ?
Pourquoi Etchebest est encore obligé d'aller expliquer à des restaurateurs que s'ils font du frais et du local, les gens reviendront ?! (Oui, même dans cette période de pass sanitaire, les restaurants pourraient se remplir en faisant attention à la qualité de la bouffe ou du cocktail !).

Bon, mais faut que je trouve une conclusion à cette histoire...

épilogue, épinoche

Un bon repas c'est d'abord un bon produit. ça c'est le petit 1.

2. Gouter ce jambon-beurre c'est un vrai plaisir. Faut le dire quand même puisque je n'ai même pas parlé de plaisir que cela m'avait procuré de le manger.

Et petit 3. Mais bordel de merde à la fin, tous devraient être comme ça. Tout le monde devrait pouvoir faire du jambon-beurre de cette façon.

ça me rappelle un débat que j'avais eu plus tôt. Qu'est-ce qu'un vrai gratin dauphinois, une vraie carbonara ? Faut-il être puriste pour apprécier les bonnes choses ?
Les carbonara normalement c'est des oeufs et de l'eau de cuisson avec de la pancetta, c'est onctueux, c'est bon. Est-ce que ça m'empêche d'apprécier les carbonara "française" avec des lardons et de la crème ?
Non.
Je ne veux pas être puriste. Je ne suis pas puriste. J'accepte les changements de recettes, les tests.
Mais une fois qu'on a gouté des carbonara "française" avec un vrai cochon et une bonne crème, rien n'est plus pareil.

Je ne demande pas que toutes les boulangeries du monde fasse que du jambon beurre, la vie serait triste sans d'autres types de casse-croute.
Mais je voudrais qu'on ne propose que des produits comme ça.
Je suis même pas contre un McDo, vous l'aviez compris un peu plus tôt. Mais je veux pouvoir avoir la qualité d'un sandwich, désolé pour l'anglicisme, où et quand je veux.
Nous devrions tous pouvoir faire ce genre de choses.

C'est un peu court jeune homme, mais c'est ma rentrée et le sujet du jour était une fois de plus l'occasion de parler d'une tranche de vie.
Bref, j'ai mangé un jambon-beurre.

Conclusion surprise :

Nous avons tous besoin de (re)connaitre les bonnes choses. Ce jour-là, j'ai compris que j'étais plus heureux que je ne le serai le lendemain. A ce moment là, je savais que tout allait devenir plus chaotique. J'ai compris que j'avais de la chance de vivre une expérience si primitive qu'elle ne se reproduirait pas de sitôt.
Non pas que je ne retournerais jamais acheter de casse-croute. Mais ces quelques bouchées m'ont fait comprendre de l'importance de voir le bon en toute chose et tout le temps.

Aujourd'hui où mon avenir s'annonce plus qu'incertain, je me rappelle qu'à ce moment-là au pied de la Tour Eiffel, je me suis rendu compte que j'étais bien au présent.
Je n'attendais rien de plus qu'un jambon-beurre et une pause. Je profitais de l'instant.
Ma plus grande révélation : j'ai eu des dizaines, des centaines de moments similaire dans ma vie. Des moments où j'étais bien sans forcément savoir pourquoi.
Je suis heureux de vivre ce genre d'évènement.
Et la colère, saine, que j'ai ressentie une fois le papier jeté et la voiture redémarrée était juste une réaction de mon esprit pessimiste au retour à la réalité, au travail, au soucis.
Je ne suis pas malheureux. Je ne pense pas l'être.
J'ai simplement ce que je mérite.

Et tout le monde mérite un véritable jambon-beurre.

Bonne semaine.
A bientôt.
La prochaine fois on parlera de déterminisme et de réalités parallèles.
Ou pas.
Portez-vous bien !

à suivre...

LA PAGE D'AVANT

Sommaire