myrzouick
écrire, scénariser et mourir vite...
28/04/2021
tout est lié
On m'a demandé récemment de parler plus de moi. Comme si ce n'était pas déjà suffisamment le cas. Depuis la page 3 de ce blog, je vous le dis, je ne parle que de moi. Tout le monde ne parle toujours que de soi.
C'est pourquoi certaines histoires résonnent plus en nous que chez les autres.
C'est pour ça qu'on ne peut jamais avoir la même expérience devant un livre, un film ou même devant une personne tierce !
Le vécu de chacun est une chose si intime et si complète qu'on ne peut s'empêcher de vivre à travers un prisme très personnel.
Ainsi, tout ce que je dis, tout ce que je ressens et, donc, tout ce que j'écris est une expérience qu'il faut lire et essayer de comprendre à travers mes références, ma culture, mes yeux.
Je ne parle donc que de moi.
Mes idées, mes goûts, mes critiques.
Malheureusement (ou heureusement) personne d'autre que moi ne peut être moi, ne peut comprendre ce que je ressens et ce que je vis chaque jour.
Alors oui, nous pouvons nous retrouver, nous écouter et nous comprendre via quelques idées communes ou quelques goûts identiques, mais nous sommes à jamais, et irrémédiablement, seuls.
Nous nous ressemblons, nous savons communiquer, fort heureusement, mais nous ne pouvons découvrir quelqu'un ou quelque chose qu'à travers nos yeux et ne dit-on pas que les yeux sont les reflets de l'âme ? Donc nous ne décryptons quelque chose qu'à travers nous-mêmes...
Quoiqu'il en soit, et pour être un petit peu plus optimiste, je remarquerai simplement que tout est lié. Et oui, ça fait une longue introduction pour parler de quelque chose que vous savez déjà.
Je rassure ceux qui ne veulent pas entendre parler (ou plutôt lire) de moi que...
bah déjà, qu'est-ce que vous faites sur ce blog ?
Mais surtout que nous allons quand même essayer de parler un peu écriture et d'histoires.
rien ne nait jamais
Alors oui, si, j'entends.
Non mais vraiment, oui, tout le monde nait quelque part. Je veux dire on est tous nés à un moment donné, c'est ça qu'on fête tous les ans avec les amis et la famille. Donc oui on est né. Tout le monde est né...
Mais !
Mais être né quelque part pour celui qui est né, c'est toujours un hasard.
Nom'inqwando yes qxag iqwahasa.
Attendez, je reprends.
En est-on vraiment sûr ?
Je veux dire oui, physiquement, vous êtes là quelque part entre ici et l'ISS et vous êtes là depuis un certains temps entre la dernière minute et plus d'une centaine d'années auparavant, mais depuis quand existez-vous réellement ?
Creusons un peu sans aller dans de la métaphysique tout de suite.
Est-ce que vous êtes là depuis votre naissance ou n'existez-vous que depuis votre conscience ? Et même lorsque vous n'étiez pas conscient, étiez-vous ? Si nous sommes parce qu'on pense, pense-t-on avant d'être ? Sommes-nous avant de penser ? Quand se situe le moment où vous êtes né ?
Quand se situe votre naissance, dans un hôpital le premier jour de votre "vie" ? Un peu avant, genre 5 mois avant ?
On considère que la durée légale pour avorter en France est de 12 semaines, il se passe quoi ensuite ? c'est une question de physique ? Dès que le coeur bat ? C'est parce que le foetus ressemble pour de bon à un vrai petit humain ? C'est quand la naissance ? à partir de quand il y a un être vivant qui se dessine dans le ventre de la mère ?
Me faites pas rentrer dans un débat pour lequel je n'ai aucun autre avis que c'est à celles qui ont des utérus de décider en fonction des causes et conséquences d'une grossesse.
Mais sans entrer dans des débats partisans et stérile, un foetus pense-t-il ? En tout cas, il réagit à la voix de la mère, au toucher du père, etc.
Ou alors est-ce qu'on nait dès la division de l'ovule ?
- Attention, je ne parle uniquement de division de l'ovocyte car certaines expériences ont prouvé qu'il n'y aurait peut-être pas besoin d'un spermatozoïde pour faire un être vivant. Mais on ne sait pas encore techniquement comment faire.
Et il n'y a pas de brassage génétique...
Donc ça fait des clones.
De la mère... donc on est pas dans la -
Alors quand êtes vous né ?
Si c'est votre conscience qui vous permet d'affirmer que vous exister à partir de quand vous construit-elle ? Mais surtout, que construit-elle ?
Si je vous dit que la plupart du temps, dans notre existence, nous passons notre temps à adopter, copier et adapter des attitudes, des caractères, des "us et coutumes" qu'on nous a transmis.
Nous sommes, à n'en pas douter le fruit de l'expérience de nos parents, de nos grands parents et de toute une évolution qui nous a fait passé d'un petit poisson qui marche hors de l'eau à ça.
(et je sais qu'on a commencé par être un tas de molécules - elles-mêmes n'ayant été qu'un atome d'hydrogène chauffé à blanc - pas la peine de l'écrire dans les commentaires.)
(comment ça y a pas de commentaires ?)
Nous sommes aussi l'expérience de ceux qui nous entourent et OUI même ceux qui veulent s'isoler des groupes sociaux sont en fait des archétypes.
Et je dis archétypes sans penser à mal. Nous sommes tous uniques, je ne le nie pas, mais nous adoptons des modèles plus ou moins préétablis par la société, l'histoire ou nos proches : le monde quoi !
Donc nous sommes tous des archétypes plus ou moins évolués, plus ou moins adaptés, plus ou moins instruits par tout un passé qui nous a défini. Ce qui fait qu'il est parfois difficile d'adopter de nouvelles orientations.
Sachant ça, je repose ma question depuis quand vous êtes nés ? Vous êtes nés physiquement d'une mère quelque part dans le monde, mais ce sont tous ceux qui vous ont élevés, éduqués qui ont fait de vous ce que vous êtes. On peut donc dire que vous êtes né quand vous avez acquis l'expérience "ultime" de vos ancêtres.
Et oui encore une fois, le rejeter c'est aussi se définir par rapport à ceux qui vous ont précédés. Quand bien même tout ne serait pas rejeter en bloc, vous n'auriez pas pu savoir que vos prédécesseurs faisaient des erreurs s'ils ne les avaient pas faites "pour vous".
A ce propos...
Alors je ne pense pas que je vais me faire des amis mais j'ai besoin d'écrire pour réfléchir.
déboulonner les ancêtres
Notre histoire, surtout celle des hommes blancs, est jalonnée de pas mal de gros abrutis.
Alors on peut se le permettre aujourd'hui car on nous le rappelle régulièrement. Mais nous, européens, exilés ou non, avons vendu des esclaves, colonisé des pays entiers et asservi des peuples pour la simple et mauvaise raison que nous nous croyions à ce moment là supérieurs.
Aujourd'hui, de plus en plus d'universitaires, d'étudiants, d'historiens, font un examen de notre passé et nous demande des comptes.
Rien de plus normal.
Notre histoire est écrite dans le sang d'hommes et de femmes qu'il faut réhabiliter.
Doit-on la réécrire ? Doit-on la bannir, la maudire ?
Je ne pense pas. C'est comme ces vieux films ayant aujourd'hui des relents coloniaux ou racistes. Les siamois de la Belle et le Clochard sont clairement des références au "péril jaune" sournois et méchant.
Parce que oui, on s'est toujours servi des contes pour avertir les enfants. Des contes plus ou moins imagés qui nous mettent en garde contre les loups ou les rouets trop pointus. Alors quand on explique à nos enfants qu'il faut se méfier des siamois et qu'on les maquille comme des asiatiques, ça la fout mal. Quelque part l'image reste. La preuve, c'est la première qui me vient (et dieu sait qu'il y en a d'autres).
Mais doit-on pour autant supprimer la Belle et le Clochard ? L'amender ? Le couper ? Le contextualiser ? Que faisons-nous de cet héritage ? Que faisons-nous de ce dessin animé aujourd'hui ?
Suis-je devenu plus méfiant envers les siamois ou envers les Chinois après avoir vu la Belle et le Clochard ? Qui en fait est une propagande de la bourgeoisie qui explique qu'on ne peut vivre correctement qu'en ayant un toit et des biens !
Est-ce que contextualiser une oeuvre, une statue, suffit ?
Doit-on rayer les noms de rues au risque finalement d'en faire des martyres ? De répéter l'histoire ? Parce qu'on est bien d'accord qu'oublier c'est aussi répéter. On ne peut pas juste effacer son passé aussi sordide soit-il.
Pour continuer dans mon histoire de naissance.
J'ai un arrière-grand-père colonialiste. Il n'était pas foncièrement méchant, il était d'époque. Et l'époque était ce qu'elle était.
Raciste ? Aujourd'hui oui. Quand on le lit avec le recul que la société nous a appris.
Est-ce que garder ses textes et ses photos fait de moi un nostalgique ? Non. Je sais faire la part des choses entre ce qu'il était et ce qu'on peut dire aujourd'hui. Il est facile de dire aujourd'hui "il aurait fallu résister, se battre pour changer les choses" vous savez bien que c'est impossible.
Qu'il faut y aller pas après pas et éveiller les consciences peu à peu, de générations en génération.
Il faut aujourd'hui avoir un regard raisonné sur ce passé sanguinaire surtout sans le censurer ou l'amoindrir.
Nous sommes donc aussi nés de ces guerres et de ce regard qu'on leur porte des années plus tard.
Nous sommes nourris en permanence d'images qui aiguisent ou émoussent - hélas - notre esprit critique.
Nous sommes la somme de nos expériences.
Alors quand êtes-vous né ?
je ne suis jamais né
Et si nous sommes la somme de nos expériences, de notre vécu, du vécu de nos parents, de nos ancêtres, de notre Histoire, que nous ayons décidé de l'adopter ou de la rejeter, qui sommes nous et surtout quand sommes nous ?
Si je provoque un peu quand je vous dis qu'on ne peut pas savoir avec précision quand vous êtes né, ce n'est pas pour vous dire que vous n'existez pas (quoique), ni pour promouvoir l'avortement, c'est surtout pour vous faire remarquer que notre histoire n'est jamais finie et a commencé il y a bien plus longtemps que vous ne l'imaginez.
Alors oui, c'est un peu bateau de dire que nous sommes le fruit d'une infinité de hasards nous emmenant du big-bang au seul spermatozoïde permis d'entrer dans un ovule.
Mais c'est aussi ça que nous sommes.
Je ne suis jamais né parce que je n'existe qu'à travers un tas d'autres choses, un tas d'autres histoire, un tas d'autres hasards qui m'ont amené là ici et maintenant.
Et c'est d'autant plus flippant quand on pense que toute cette chaine d'histoires doit être digérée et retransmise à ses enfants ! Pour qu'eux-mêmes existent en adaptant ou en rejetant ces préceptes.
Et ça, c'est terrifiant...
Bien sûr que j'ai peur, peur de ne jamais réussir à transmettre ce qu'on m'a transmis, peur de mal raconter mon histoire, mes histoires et l'Histoire en général. Peur d'être mal entendu, mal compris, mal interprété.
Peur d'être un gros con. Peur de décevoir. Peur d'être oublié...
À votre avis, pourquoi je passe mon temps à utiliser des synonymes lâchement planqué derrière des virgules. C'est plus qu'un TIC, c'est une obsession, je veux être sûr, certain, d'être compris.
Ce n'est pas un effet de style, moi-même je n'ai pas tous les bons mots au bons moments pour écrire ce qui se passe dans ma pauvre tête d'ahuri.
Il est difficile de mettre des mots sur ce que l'on est. Il est difficile de trouver parmi toutes les histoires et les expériences quand je suis vraiment né.
Comme il est difficile pour moi de prévoir ce que deviendra mon fils.
Comme il est difficile de transmettre.
Tout ça n'est pas inné, je suis le fruit minuscule d'une infinité de hasards.
J'ai fait des choses bien, j'ai fait des choses mal. Je suis certain que les unes comme les autres me définissent complètement. Un être coincé entre gris clair et gris foncé comme dirait Goldman.
Je suis né plusieurs fois au cours de ma vie. Je me suis révélé, j'ai été défini par tous ceux qui m'ont côtoyés. J'ai aimé être ce qu'on attendait de moi, j'ai aimé joué un rôle, j'ai aimé être seul et pourtant j'ai aussi aimé être entouré.
Finalement j'aime aussi échouer. Échouer par exemple à trouver une définition correcte de ce que je suis.
J'aime être grand et charismatique, mais j'aime être laid et me faire tout petit.
Moi c'est trop compliqué, surtout que je n'ai pas accès au plus profond de moi : le ça de Freud ! Alors je me contente de ce que je pense que je suis et j'arbitre ce qui me définit peu à peu.
Chacune de mes expériences et de mes réactions me caractérisent par rapport aux autres et par rapport à ce que je suis au plus profondément.
Corsons un peu la chose avant ma conclusion.
Et si en plus, nous étions la somme métaphysique de nos vies "passées".
Depuis le début je dis la même chose, mais en allant plus loin, pouvons-nous parler de nos âmes ? Du recyclage de nos âmes ? Et donc de la réincarnation ?
Non parce que qu'on soit clair si toutes les âmes de ce monde ne sont pas recyclées ça doit faire un tas de belles ordures en enfer. Il faut trier et recycler !
Blague mise à part, si nous étions aussi inconsciemment le fruit de nos vies passées ? Si nos consciences étaient légèrement tintées de ce que nous avons été avant ? Avant la naissance ? Avant la connaissance ? Avant tout simplement ?
épilogue, épitomé
épitomé : abrégé d'un livre, d'une histoire.
Une fois encore "le mot commençant par épi" de cet article est très révélateur, j'essaie toujours de les choisir avec soin même si au fur et à mesure, j'en trouve de moins en moins.
Mais c'est exactement ça, nous ne sommes, aussi complexes soyons nous, qu'un épitomé de tout ce qui nous entoure et de la compréhension qu'on en a.
Qu'on soit clair ça ne nous empêche pas d'être des individus uniques et bien plus complexes qu'on ne pourrait le croire.
Mais nous ne sommes pas délimités qu'à notre propre existence.
Voilà.
J'ai parlé de moi, de mes peurs, de ma naissance, du prisme par lequel je vois la vie.
Ou pas !
Ai-je vraiment parlé de moi ?
Et si, dans ce texte, vous remplaciez "moi" par "cinéma" ?
Après tout le cinéma n'est que la prolongation des longues traditions orales, des contes, du théâtre et autres artifices pour mettre une histoire en mouvement. Le cinéma repose sur une histoire faite de technologies, d'innovations, mais aussi de contraintes, de combats.
Le cinéma est sujet à interprétation et ces différentes compréhensions le colorent peu à peu de nouvelles colorations !
Tout un passé sur lequel on se repose pour raconter de mieux en mieux des histoires.
Car je ne le répète que trop mais chaque histoire racontée fait progresser quelqu'un.
C'est vrai pour l'humanité, c'est vrai pour l'art en général, le cinéma en particulier.
C'est vrai pour l'écriture. Je crois qu'il faut beaucoup lire pour mieux écrire et c'est ce que j'ai toujours essayé de faire - et je n'écris pas toujours bien.
Chaque histoire a un lien avec une autre, chaque histoire définit la prochaine, aucune histoire n'est jamais née si ce n'est la première fois qu'un jour, il y a très longtemps, un de nos lointains ancêtres en tendant l'oreille a intimé à ses compagnons de se taire et murmuré : "entendez-vous cette rumeur ?" ce n'était alors que son imagination car aucun autre n'avait rien entendu. Mais dans son esprit, un souffle, un murmure, peut-être un dieu, en tout cas une inspiration était née. Parce que cet homme, fut le premier, à imaginer quelque chose...
Je ne suis jamais né, car j'existais bien avant de naitre. J'existais bien avant d'être. Aujourd'hui j'avance sereinement ou presque dans le reste de ma vie qui m'attend. Une vie où je passerai désormais plus de temps à transmettre...
C'est peut-être ça le mot de la fin en vérité, on "est" enfin lorsqu'on a plus à transmettre qu'à apprendre. Cela ne veut pas dire qu'il faut arrêter d'apprendre, mais que notre rôle change : de lecteur on devient conteur.
PS : mon anniversaire ça reste le 15 octobre quand même !
J'ai beaucoup écrit aujourd'hui, j'en suis désolé.
De toutes façons, je ne vous force pas trop, juste un peu.
Passez une bonne soirée, une bonne semaine...
Portez vous bien.
à suivre...