myrzouick
écrire, scénariser et mourir vite...
16/02/2020
bonjour c'est dimanche...
...et comme chaque dimanche on parle d'écriture sur un blog obscur que personne ou presque ne lit jamais. Mais qu'à cela ne tienne, après tout c'est pas grave y a pire dans la vie alors ne nous laissons pas abattre et marchons dans les pas de nos auteurs préférés pour comprendre une bonne fois pour toutes leurs intentions.
J'aime chercher le moment précis où une idée a pris vie dans l'esprit d'un auteur et voir comment elle s'est développé au cours des années pour devenir un grand livre, un grand film, ou n'importe quoi qui nécessite un peu de réflexion.
Mais avant tout ça, petit coup de gueule. !
Vous allez probablement dire que je chipote, mais ça y est, j'en ai trop vu.
Un peu de contexte.
Depuis peu, quelques années tout au plus, et l'émergence des plateformes de streaming légal, les séries ont le vent en poupe. Et elles permettent aux créateurs de toute sorte de pouvoir s'exprimer et de pouvoir prendre son temps.
Avec les plateformes est arrivé la mode du binge watching qui consiste à regarder tous les épisodes d'une série en une seule fois et la plupart du temps de demander au CM de Netflix juste 10h après la sortie de la série "la saison 2 ?"
Ce qui a le dont de l'agacer mais c'est le jeu, tout le monde le sait et ça pose au moins la question. Est-ce que le binge watching c'est bien ou est-ce que c'est pas bien.
Je me souviens quand j'étais jeune, c'était y a pas si longtemps et je vous emmerde, nous devions attendre toute une semaine pour voir la suite des aventures de Jack Bauer, 24 (heures chrono en VF) et franchement ça faisait monter la pression quelque chose de puissant.
D'ailleurs bizarrement c'est une série qui mériterait le binge watching... Le spectateur restant coincé lui aussi durant plus de 18h ! (oui, 24h ne se déroule pas en 24h car les publicités étaient comptés dans la version américaine mais l'intrigue se déroulait en une journée.
Et c'était bien classe, je veux dire, peut-être qu'aujourd'hui j'en ai un meilleur souvenir que ça ne l'était vraiment, mais je me souviens avoir été un fan absolu dès la saison 1 sur Canal+. Et beaucoup de séries ont voulu copier cet ambiance (oui c'est toi que je regarde Homeland) sans jamais réussir.
Non vraiment si on parle de Homeland je pourrais résumer la saison comme ça : c'est un terroriste, en fait non, en fait oui, en fait non, en fait oui et... j'ai pas regardé la saison 2.
Donc on n'en parle pas.
Non vaut mieux pas.
Donc à l'époque il fallait une semaine pour emmagasiner un épisode et attendre la suite.
Alors je vais pas me la jouer "OK Boomer" et dire "oui, mais dans la vie, attendre c'est aussi un plaisir, vous les jeunes, vous avez tout tout de suite, c'est ça le problème de votre génération, vous êtes incapables d'attendre. Et puis il vous faut tout, des magasins ouverts 24/24, des bébés qui..."
Stop.
Ma génération a su attendre et elle ne le sait peut-être plus.
La génération d'après moi (ma soeur par exemple) ne connait pas la pub pour Vittel et apprend à vivre avec ubereats et compagnie
Chaque génération ses forces et ses faiblesses. Ma force c'est les années 90 dans lesquels j'ai grandi avec ses contraintes technologiques (pas de portable, un épisode par semaine, pas de streaming et encore 6 chaines, putain, je suis vieux...)
Ma soeur peut avoir tout tout de suite, mais toute sa génération ne trouvera pas de boulot aussi facilement que mon père et elle n'aura pas de retraite.
"Oui, mais s'ils trouvent pas du boulot c'est parce qu'ils veulent rien faire on attend de tout leur apporter sur un plateau et..." Ok boomer.
En vrai on n'arrive plus à communiquer entre nous sans nous envoyer des reproches. et c'est un vrai problème. Personne ne comprend personne. Et plus personne ne se met à la place de l'autre.
Je ne me répèterai pas assez, la base du respect c'est notre capacité à se mettre à la place des autres.
un jour faudra que je m'en tienne au sujet
Ce n'est pas du tout ce dont je voulais parler. En vrai, je voulais parler des monologues.
Mais surtout les monologues dans les séries.
Je disais donc que dans les séries, les créateurs ont eu d'un coup plus de temps pour étoffer leurs intrigues et leurs personnages.
En effet avec la série on passe d'une intrigue qui doit durer 2h en moyenne à une intrigue qui peut se rapprocher d'une dizaine d'heures (voire de plusieurs dizaines d'heures).
Le calcul est simple dans une série on a donc plus de temps. Ce temps peut être utiliser pour : 1. suivre plus de personnages ou 2. étoffer les interactions entre eux et l'intrigue.
Le saviez-vous : la durée moyenne des films qui sortent au cinéma n'a que peut augmenté en réalité passant de 98 minutes en 1968 à 106 minutes en 2018.
Avec les séries donc les créateurs peuvent prendre le temps de prendre leur temps.
Malheureusement, peut-être que 10 heures (ou un peu moins) ça en devient trop long et chaque épisode d'une série ne pouvant pas avoir le même budget que les autres (j'imagine que la bataille des bâtards de Game of Thrones a dû couter plus chère que les 4 épisodes précédents. Donc on en vient à devoir remplir des épisodes avec...
Avec quoi ?
Et ça là que mon coup de gueule arrive : avec des monologues censés approfondir l'histoire d'un personnage. Mais qui ne sont rien que des monologues vides où même la réalisation s'arrête pour laisser jouer l'acteur... La caméra est fixe ou alors il y a un long très long et lent travelling sur le personnage qui raconte un truc. Et je suis désolé, mais ça sent vraiment la fin des moyens.
Et pourtant j'aime les monologues, souvent parce qu'ils sont confiés à des acteurs qui justement le portent et savent placer la voix, le ton, le regard.
Prenez les monologues de V pour Vendetta, ils sont tous réussi et dans certains le monologue devient une voix off pour montrer des images d'illustration je dirais.
Prenez le monologue d'Otis le Scribe, uniquement là pour ennuyer le spectateur et laisser à un Edouard Baer en roue libre (pour notre plus grand plaisir).
Le monologue de Pulp Fiction (la montre), le monologue de Trainspotting. Il y en a plein qui ont fait leur preuves mais pour moi, c'est bon cette fois, il y en a trop.
Et dans les séries, lors de ces monologues, qui sont en fait des flash back, une histoire personnelle racontée à un autre (ou au spectateur), pour justement copier ces maitres cinéastes qui ont pris le temps dans un film de 2h (ou moins) de casé un monologue sont de trop.
Le format le permet ! Donc il n'y a rien de transgressif, rien d'artistique à faire du monologue dans les séries. Les monologues au cinéma ont de la gueule, ils viennent pour casser le rythme, la réalisation continue. Dans V, les gens le regardent, on voit leur réaction. Dans Astérix Mission Cléopatre, c'est juste pour la blague.
Dans les séries, le monologue me rappelle trop souvent qu'il est là pour faire du remplissage. Si vous n'avez pas le temps ou les moyens de faire autrement que de laisser la caméra tourner et laisser un acteur prendre la parole pour raconter à quelle point sa jeunesse a été difficile, vous échouez.
Au cinéma, et dans les séries, si vous voulez dire quelque chose ne le dites pas montrez le.
Là où vous voyiez des effets de style dans le cinéma de Tarantino à Scorsese, dans vos "films" de 1O heures ça pue le remplissage, désolé.
Oui, j'ai dis Scorsese parce que je pense à un des monologues de Jack Nicholson dans Les infiltrés un film que je recommande mille fois !
épilogue, épicyème
Vous savez que depuis que j'écris, j'apprends des mots. Parce que j'essaie toujours de trouver des mots qui commencent par "épi"... Et vous savez quoi, si vous cherchez un peu tous les "épi" que j'ai mis dans mes articles, y en a qui colle superbement bien.
Vous l'aurez donc compris, ces monologues dans des séries où même le réalisateur arrête de bouger et laisse tourner la caméra en attendant que son acteur fasse le boulot m'ennuie.
J'en vois de plus en plus et ça m'emmerde vraiment.
Scène 54.
Extérieur nuit.
L'acteur est assis sur un tronc d'arbre. Le feu crépite. Il semble regarder dans le vide.
JOHN
à quoi tu penses ?
TOM
ce feu... Il ne me réchauffe pas.
JOHN
pourquoi ?
TOM
je suis sans vie à l'intérieur...
La caméra s'arrête sur le visage de l'homme qui parle...
TOM
c'était il y a des années, dix ans peut-être. Je ne sais plus. J'ai arrêté de compter. Nous étions jeunes, insouciant, insoumis. La guerre était loin, on ne la croisait qu'au détour d'une rue sur des affiches. Nos soldats semblaient grands et beaux. Mais il y avait ce détail, ce sourire, ces dents blanches. Je n'aurais jamais cru que la guerre était une mauvaise chose. Alors, comme beaucoup, je me suis engagé. J'ai été entrainé dans un camp au nord du pays, il faisait froid mais nous étions proches.
Un soir, alors que je dormais, Marcus m'a réveillé, il m'a dit de m'habiller et nous sommes sortis. Il neigeait, je te le jure, il neigeait. La nuit était grise, la lune disparaissait derrière les nuages.Il n'y avait pas un bruit dans le camp. Tout le monde dormait. Quelques lumières, faiblardes, et ses flocons pour seul compagnon. La couche de neige était déjà épaisse. Nous nous sommes laissés tomber dedans. Nous nous sommes roulés dedans. Nous avons ri, nous avons joué. Nous ressemblions aux soldats sur les affiches. Inconscient de la guerre. Heureux, amoureux. Je me souviendrai toujours de cet instant. Un instant trop bref, trop cher. C'était la dernière fois que je voyais la neige. C'était la dernière fois que je voyais Marcus. Ils l'ont pris. La guerre l'a pris.
- Attends, on s'en fout. Pourquoi tu écris ça ?
- Fallait bien que je remplisse ma conclusion, j'avais pas grand chose à dire...
Le format que vous choisissez pour faire passer vos idées, pour faire vivre vos oeuvres, est important.
Films ou série. Nouvelle ou roman. Article ou vidéo. Les créateurs doivent autant faire attention à la forme qu'au fond. Et aujourd'hui, ne soyez pas feignant. Si vous n'avez rien à dire, ne le dites pas. Si vous n'avez rien à écrire ne l'écrivez pas.
Pour cracher une dernière fois sur Game of Thrones, ça servait à rien de remplir une série de vide si c'était pour la rusher à la dernière minute.
Je ne sais pas si c'est pareil pour tout le monde mais je sais rarement où je vais quand je commence à écrire, j'ai des idées, je sais où j'aimerais aller. Mais souvent je me laisse porter. Quitte à tout réécrire une fois que j'ai compris ce que je voulais.
Mais je vous raconterai ça une autre fois.
Ce qui est important aujourd'hui c'est de dire que chaque créateur doit faire attention à la forme qu'il veut pour son oeuvre. Toutes les histoires ne méritent pas d'être racontée de la même façon.
Toutes les histoires méritent du temps. Ne nous laissons pas enfermer dans une forme qui ne nous convient pas.
Facile à dire, pas à faire.
Bonne semaine !
Bonne soirée.
à suivre...